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Tournoi des 6 Nations 2015, récit et perspectives

Tournoi des 6 Nations 2015, récit et perspectives

Cadrage-débordement, pour un article en deux temps. Acte I : retour sur le Tournoi 2015, journée par journée, à travers le compte-rendu détaillé d’une des trois rencontres disputées et le résumé concis des deux autres. Acte II : projections sur le futur qu’il peut présager, à quelques mois du quadriennal rendez-vous mondial.



PREMIERE JOURNEE : Les Anglais marquent les esprits. 

Pays de Galles 16-21 Angleterre : Hybride et conquérant, le XV de la Rose frappe fort

L’entame est galloise. Après un renvoi court, « de récupération », capté par Toby Faletau, les hommes de Warren Gatland prennent leurs adversaires anglais à la gorge... et rapidement les devants. Pénalité de Leigh Halfpenny (3-0, 2e minute de jeu). Quelques instants plus tard, Faletau (encore lui) s’extirpe d’une mêlée fermée (pourtant) chahutée, à dix mètres de la Terre Promise. Après un raffut sur James Haskell et une course en travers, il résiste au plaquage de George Ford et, d’une passe offload, sert son numéro 9, Rhys Webb, qui pointe dans l’en-but, sans opposition. La 89 n’est pas très académique, le surnombre défensif mal négocié par les joueurs de la Perfide Albion ... mais le constat est implacable : les Anglais n’y sont pas et comptent déjà dix points de retard car l’arrière gallois se charge d’aggraver la marque (10-0, 8e min). Cependant, le sursaut ne tarde pas. Les boys de Stuart Lancaster mettent la main sur le ballon et répondent rapidement, par un essai d’Anthony Watson (10-5, 15e min), jeune (21 ans dans quelques jours) et prometteur ailier de Bath.

La partie s’équilibre. Les buteurs se rendent coup pour coup (13-5, puis 13-8) jusqu’à ce que, sur le gong, l’ouvreur gallois Dan Biggar, ne réalise un magnifique drop de près de 40 mètres. A la pause, les héros du Millennium Stadium de Cardiff mènent sur le score de 16 à 8.

Fidèle à son Histoire, avec un pack de fer et une mêlée dominante, autant qu’impétueux envers elle (car doté d’insaisissables arrières formant une ligne de trois-quarts virevoltante), le XV de la Rose va alors se montrer impérial en deuxième mi-temps. Peu après la reprise, dans les 22 adverses, Jonathan Joseph (23 ans et promis à un bel avenir comme Watson, son coéquipier en club) est servi en position de numéro 10. Face à la montée défensive désordonnée des Gallois, il peut faire parler ses formidables qualités d’explosivité, élimine trois joueurs et se fraie un chemin jusqu’à la zone d’essai. Les Anglais grignotent ainsi leur retard (16-15, après la transformation de Ford, 44e min) puis le muent en avance (16-18, peu après l’heure de jeu) et augmentent celle-ci (16-21, à deux minutes de la fin), malgré un manque d’efficacité criant. Le baroud d’honneur des Dragons Rouges ne donnera rien. C’est bel et bien l’Angleterre qui démarre ce Tournoi de la plus belle des manières.

Italie 6-23 Irlande : Au forceps, mais avec maîtrise, le tenant du titre répond présent

Encore au contact à la mi-temps (3-9), les Italiens craquent face au rouleau-compresseur irlandais, en deuxième période. Ce match entre la meilleure et la moins bonne équipe du précédent Tournoi, finalement assez serré, bascule en effet à l’aube des vingt dernières minutes lorsque le carton jaune reçu par Ghiraldini (64e min) est payé « cash » par les Italiens. Quelques instants après, Murray marque, en filou, après un très beau peel-off sur une touche à 5 mètres (65e) puis O’Donnell l’imite, en transperçant la défense adverse, avec une facilité déconcertante (67e). En trois minutes, le score est passé de 3-12 à 3-26. Les Irlandais entérinent leur succès et ne manquent pas leur entrée en lice.

France 15-8 Ecosse : Sans gloire et sans essai, un Coq poussif vainc un Chardon ardent

Dans une tunique rouge qu’ils n’avaient plus arborée depuis la fin des années -50, les joueurs français ont peiné à dominer une sélection écossaise qui semble en constants progrès depuis le début de l’ère Vern Cotter, mais reste trop « légère ». En tête de la 3e minute de la rencontre (3-0), jusqu’au terme de celle-ci (9-8 à la pause, 15-8 au final), le XV de France n’a jamais su se détacher significativement, restant jusqu’au bout sous la menace d’Ecossais entreprenants (Stuart Hogg, leur feu follet d’arrière, en tête) qui ont marqué un essai et n’en ont encaissé aucun. Après ce match, les doutes subsistent dans le camp français.

DEUXIEME JOURNEE : les favoris font respecter l’ordre établi.

Irlande 18-11 France : un XV du Trèfle pragmatique défait des Bleus approximatifs

Pour les grandes envolées, il faudra repasser. En effet, lorsque Teddy Thomas mange un « quatre contre deux » dès la première minute de jeu, ni lui, ni les Bleus, ne savent qu’ils viennent de laisser s’envoler l’une de leurs seules occasions de briller. La partie s’avère donc rapidement fermée et, dans ce tête-à-tête cadenassé, c’est le Trèfle qui frappe le premier. Quand le XV de France gaspille un ballon intéressant, en envoyant Bastareaud percuter Sexton, sur un lancement sur-stéréotypé*(8e minute) _ bloqué en haut, le centre français est à l’origine d’un maul dont la gonfle ne sera jamais extraite... et qui aboutira donc à une mêlée verte _ les Irlandais, eux, n’ont besoin que d’une occasion pour scorer (3-0, 13e minute). Réponse française : chandelle mal captée par Kearney, contest gagnant de Ben Arous et sanction assénée par Lopez, de 40 mètres face aux perches (3-3, 17e min). Mais tous points marqués se doivent d’être validés par une réception assurée... les Irlandais récupèrent leur propre renvoi et reprennent immédiatement les devants (6-3, 19e min). 

Le jeu s’emballe _ un peu _ et la France fait sa première incursion dans les 22 adverses, après une demi-heure de jeu... mais sur un maul mal ordonné, elle est pénalisée. Sexton ramène les débats aux alentours de la ligne médiane. Les Irlandais, peu dangereux sur la largeur, conservent le ballon et obtiennent une occasion de marquer, plein axe, sur la ligne des 40 : du bain béni pour leur ouvreur (9-3, 33emin). Quelques minutes plus tard, les rôles sont échangés, s’appuyant sur un schéma identique les Bleus croient revenir à 3pts de leurs hôtes au changement de côté (9-6, 36e min), mais c’est sans compter sur la qualité du jeu au pied de Sexton. Excellent renvoi qui permet aux Irlandais de pousser Chouly en touche, pénalité obtenue proche des pagelles adverses, l’ouvreur du Racing-Metro 92 engrange (12-6, 39e min) et l’arbitre siffle la mi-temps, après qu’un dernier mouvement français se soit conclu par un en-avant de Spedding.

L’Irlande se montre dangereuse [quille superbement réceptionnée par Kearney, à l’orée des 22 français (44e)] mais relativement inefficace Basta sur Sexton (45e)> durant les dix premières minutes du second acte. Le Trèfle voit son emprise seulement récompensée par une pénalité de Madigan, qui supplée son ouvreur titulaire, sorti sur saignement, 15-6, 51e minute.

Dans la foulée, Saint-André change l’intégralité de sa première ligne et fait rentrer l’artillerie lourde (Atonio, Debaty). Premier mouvement de grande envergure des Français, qui parcourent 70 mètres au gré de courses tranchantes et de libérations rapides... jusqu’à ce que Lamerat se fasse arracher la beuchigue, à quelques encablures de l’en-but adverse.  Ce ballon perdu résonne comme une double-peine : Pascal Papé prend un jaune pour brutalité (53e), l’élan Tricolore semble déjà freiné ... il se brise lorsque Lopez gâche une belle opportunité, d’une passe hasardeuse. Un surnombre excessivement mal négocié par les Irlandais (56e), une mêlée bleue conquérante et une faute grossière de Best (expulsé pour dix minutes, à l’heure de jeu) ravivent la flamme. Lopez échoue dans sa tentative de pénalité (61e), quand Sexton reste métronomique (18-6, 68e minute) mais en cette fin de match c’est bien le XV du Coq qui prend l’ascendant physiquement, emmené par ses bulldozers, sortis du banc. A l’issue d’une belle action, durant laquelle les Bleus allient enfin cohérence et vitesse, Debaty décale Taofifenua, d’un « deux contre un » d’école : essai (18-11, 71e minute).

Les derniers instants de la partie voient une féroce défense verte parachever la victoire irlandaise. Côté bleu, le scénario est inversé, par rapport au match face à l’Ecosse : la France endosse cette fois le costume du perdant méritant, laissant à un XV du Trèfle peu tranchant mais efficace, celui du vainqueur peu convaincant (dans les deux cas, à domicile, le gagnant n’a pas marqué d’essai, en a encaissé un et s’est imposé de 7 points).

Ecosse 23-26 Pays de Galles: si près (?) si loin (!) les Ecossais s’inclinent encore

Alors qu’ils avaient pris les devants, dès la 10e minute, sur une contre-attaque de type 1 [récupération sur la ligne d’affrontement (7-3)] les hôtes atteignent la mi-temps avec un léger retard de 6 points (10-16). A la 64e minute, Jonathan Daviess’ouvre les portes de la Terre Promise, d’une remarquable course en cut, et plonge entre les perches : 16-26, l’affaire est entendue ? Pas si simple. Proches de revenir sur les talons gallois dès la 74e minute (lorsqu’ils se sont vus refuser un essai, marqué sur un nouveau ballon de récupération) les hommes de Cotter terminent fort : 23-26 (80emin). Le baroud d’honneur est inutile : Les Dragons Rouges se relancent tandis que le XV du Chardon reste fidèle à son statut de vaillant perdant. 

Angleterre 47-17 Italie : la logique, implacable, est respectée. Albion est lancée

Le début de match est favorable aux Latins, qui prennent les devants par leur capitaine Parisse. Les choses se compliquent rapidement : un essai (discutable) accordé à Billy Vunipola et un nouveau show de Joseph face à une défense dépassée offrent les commandes du match aux Anglais, tandis que plusieurs occasions ratées, au pied, sont à dénombrer côté transalpin. A la mi-temps, les hôtes mènent 15-5. La seconde période n’est qu’une formalité, deux essais italiens encadrent quatre autres réalisations de la Perfide Albion et le score final est sans appel : 47-17. Le XV de la Rose confirme son bon début de Tournoi et l’équipe de Jacques Brunel son incapacité à tenir tête aux grandes nations sur 80 minutes. 

TROISIEME JOURNEE : L’Irlande prend la main, l’Italie n’est pas Fanny

Ecosse 19-22 Italie : Sur le fil, et chez lui, le XV écossais perd le duel des « petits » 

Le spectre de la Cuillère de Bois plane au-dessus d’une rencontre... qui commence mal pour les Italiens. En effet, ces derniers récupèrent l’engagement de Stuart Hogg et se mettent à la faute dès le deuxième ruck du match. Pain béni pour Greig Laidlaw  (3-0, 2e minute). Dans la foulée, ambitieux, les Ecossais relancent de leurs 22 et se montre rapidement dangereux. Sans traduction au tableau d’affichage. A la 7e minute, les visiteurs effectuent (enfin) leur première passe dans le camp adverse... mais l’augure n’est pas bon : après avoir « pris » le milieu de terrain par la percussion d’un avant, les joueurs de Jacques Brunel tentent d’écarter, mais la passe de Kelly Haimona est trop lisible. Mark Bennett l’intercepte et plonge entre les perches, quelques secondes plus tard. Après la transformation, l’Ecosse mène 10-0 (9e min), et le cauchemar transalpin continue. Cependant, au moment de confirmer sa mainmise sur le match, en « validant » son essai, le XV du Chardon balbutie. Sean Lamont se saisit de la gonfle mais est poussé en touche. D’un ballon porté de près de vingt mètres, les Italiens réagissent par Joshua Furno (10-5, 10e min). S’ensuit alors un duel de buteurs : Laidlaw donne un peu d’air aux siens (13-5, 16e min) mais ceux-ci reprennent immédiatement la pression (nouvelle erreur en réception) et Haimona répond (13-8, 18e min). Bis repetita ? Lorsque le demi de mêlée écossais frappe de nouveau (16-8, 27e min), c’est au tour de l’ouvreur italien d’enquiller : il échoue... mais son échec est salvateur ! Sous les perches du Chardon, Venditti est le plus vif pour récupérer la beuchigue mal bottée. Essai transformé (37e min), 16-15 à la mi-temps.

Lors du premier quart d’heure de la deuxième période, les hommes de Jacques Brunel sont toujours sur les talons de leurs hôtes, mais se montrent incapables de les dépasser [Allan, numéro 10 remplaçant entré en jeu, rate une pénalité «dans ses cordes» (54e, 35m en face)]. Sur une belle action écossaise, Hogg croit porter le coup de grâce... « En-avant de passe ! », les positions restent figées (61e), les Scottish se contentent de creuser un petit écart de quatre points (19-15, 66e min). Il ne suffira point.

Pourtant, lorsque le ciel s’en mêle, les Dieux semblent avoir choisi leur camp : les cinq dernières minutes du match se jouent sous une pluie qui, pour le XV d’Ecosse, n’a rien de dépaysant. Quand les Italiens sont pénalisés en mêlée, à cinq mètres du Graal (77e min) le sort en semble ainsi jeté... Horne (trop ambitieux et foudroyé par une douleur à la cuisse), erreur fatale, rate la touche. Tout s’enchaîne alors, carton jaune pour Watson et progression constante des Transalpins, en direction de la Terre Promise. Alors qu’ils sont bloqués à quelques encablures de l’en-but, Andrea Manici résiste à deux plaquages aux jambes en tournant le dos à ses adversaires, prouesse technico-téméraire, pour permettre à ses coéquipiers de former un maul autour de lui. Au sein de ce dernier, avants et trois quarts italiens ne font plus qu’un. Seule une intervention répréhensible peut enrayer la progression de ce bélier des temps modernes... un Ecossais, quitte à se faire piétiner, se jette sous le rouleau-compresseur pour le faire trébucher. L’arbitre, Mr Clancy, prend ses responsabilités : essai de pénalité (19-22, 80e min).

L’Italie remporte sa douzième rencontre dans le Tournoi, sa deuxième à l’extérieur... après avoir acquis une première victoire hors de ses bases, en 2007 et, déjà, en Ecosse (37-17). Une Ecosse qui confirme ses difficultés à concrétiser et qui n’a toujours pas gagné la compétition depuis 1999, année précédant l’entrée en lice italienne.

Les Latins, ingrats partenaires de galère, insensibles compagnons d’infortune, viennent d’enfoncer le clou dans la chair meurtri de leur adversaire favori.

Irlande 19-9 Angleterre : Trop tendre Rose. « Verts le Grand Chelem » ?

A l’aube du cap des dix premières minutes de jeu, le révélateur de la possession du ballon est encore plus criant que le score (6-0), à l’heure d’évaluer l’emprise irlandaise sur l’entame de la partie : 95% contre 5% pour le rival anglais, l’écart est énorme. L’essai d’Henshaw, sur une réception acrobatique et autoritaire, au nez et à la barbe d’un Goode battu dans l’engagement, tue le suspense à la 53e minute (19-3). Dogmatique et sûr de son fait, le XV du Trèfle gagne, sans contestation possible, le sommet de ce début de Tournoi. Les joueurs d’Albion, décevants, n’ont existé qu’à travers la puissance de leur 3e ligne centre, Billy Vunipola. Ils conservent un léger espoir de remporter la compétition, mais le superstitieux présage qu’ils espéraient avancer dans quelques mois (leur dernier GC en « année WC » date de 2003... tout comme leur seul et unique titre mondial) n’est plus d’actualité.

France 13-20 Pays de Galles : Les Dragons Rouges mettent le feu à la maison Bleue

Globalement, les Gallois ont contrôlé le match. Jamais menés au score, ils ont creusé un écart important, à l'heure de jeu, sur un très bel essai en coin (6-14, puis 6-17 cinq minutes plus tard). Les Français quant à eux sont restés impuissants, enflammant seulement le dernier quart d'heure à la recherche d'un hypothétique match nul, comme lors de leur précédente rencontre. La débauche d'énergie, louable, est restée vaine et le XV du Coq a encore échoué à 7 points de son adversaire. Seulement, cette fois, l’accroc se déroule à domicile et, surtout, face à un Pays de Galles (alors 6e au classement IRB) certes revigoré, mais moins impressionnant depuis quelques mois que son voisin irlandais (3e, venant de doubler l'Angleterre)... qu’il battra pourtant sous peu. Rien ne va plus dans l'Hexagone, tandis que côté « XV du Poireau », on se prend à rêver à nouveau : remporter le Tournoi reste envisageable.

QUATRIEME JOURNEE : Galles se rebiffe, rien n’est acquis : Suspense garanti !

Pays de Galles 23-16 Irlande : Adieu Grand Chelem, bonjour dramaturgie

La première minute donne le ton du début de match : les Gallois récupèrent leur propre coup d’envoi, balayent le terrain dans sa largeur sans réussir à percer le rideau vert... mais obtiennent une pénalité. 3-0 (Halfpenny, 3e min) le duel est lancé.

Quelques instants plus tard, l’arrière gallois tape une quille pour lui-même... et s’en saisit. D’un raffut monstrueux, Jonathan Davies pénètre dans les 22 irlandais. Hors-jeu défensif, les rouges engrangent et l’écart double (6-0, 8e min). Première séquence offensive des leaders du Tournoi : mis en échec, ils reculent d’une quinzaine de mètres et se voient ramenés dans leur camp. Pénalisés dans un ruck ils offrent à Halfpenny l’occasion d’aggraver la marque, de près de 50m. Métronomique, Leigh s’exécute : 12e minute, (déjà) 9-0. Sexton rate son renvoi, Kearney se fait « manger » en l’air (comble des combles)... en ce premier quart d’heure, de l’empire du Trèfle il ne reste plus que des décombres. La Bérézina continue ! Nouvelle faute sanctionnée (12-0, 14e min). C’est à partir de la terrible blessure de Samson Lee (rupture du tendon d’achille qui remet en cause sa participation au mondial), les débats s’équilibrent (12-3, 18e min). Les Irlandais se font intercepter un lancer en touche, aux abords de l’en-but adverse, mais ils sont bien de retour : peu avant la demi-heure de jeu, Warburton prend un jaune et Sexton rapproche les siens (12-6, 30e min). Sur le pré comme au tableau d’affichage, les deux équipes se répondent du tac au tac, la pénalité du numéro 10 racingman (37e) faisant suite au drop (limpide et précieux) de son homologue, Biggar (34e). A l’issue de quarante minutes de bonne facture, le XV du Poireau vire en tête : 15-9 à la mi-temps.

A la reprise, le jeu, brouillon des deux côtés, ne réserve pas de grandes envolées... jusqu’à ce qu’une séquence énorme n’enflamme le MillenniumStadium. Avec une touche pour seule interruption, entre la 50e et la 57e minute les Gallois ne voient pas le ballon et les Irlandais flirtent avec la ligne d’essai des Dragons. Finalement pénalisés, à la grande joie et à la clameur d’un public en fusion, les derniers candidats au Grand Chelem ont perdu une bataille émaillée d’une cinquantaine de points de fixation acharnés. Une bataille qui décidera _ en partie _ du sort de la rencontre. En effet, peu après, suite à un très bon contre-ruck et un ballon de récupération bien négocié les Gallois se créent une grosse occasion : la passe de Biggar échoue en touche, mais, à moins de 10 mètres de leur ligne les Verts sont sous pression. Les hôtes mettent en échec l’alignement irlandais, campent pendant deux minutes dans les 22 adverses et prennent enfin le large, par Scott Williams qui, tout juste entré à la place de Roberts, profite d’une montée en pointe inopportune d’Heaslip pour se frayer un chemin jusqu’au plongeon libérateur (20-9, 62e min).

Le XV du Trèfle s’octroie immédiatement une opportunité en or, de recoller au score. A quelques millimètres du Graal ses joueurs échouent (66e) mais le vainqueur sortant n’a pas dit son dernier mot. La bête blessée respire encore (essai de pénalité, 20-16 à la 70e)... prend un nouveau coup sur la tête (23-16, 70e min) et finit par buter sur quatorze Diables Rouges (carton jaune pour Davies à la 78e) qui entravent sa quête de match nul. Le Pays de Galles s’impose et rebat bien des cartes. 

Italie 0-29 France : Les hommes de l’Hexagone enfoncent de faibles Transalpins

Indigentes. C’est ainsi que les quarante minutes inaugurales pourraient être qualifiées. Une tardive salve de pénalités (28e, 35e et 41emin) adoucit la purge et permet à la France de virer en tête à l’heure du break (mi-temps, 9-0). A peine plus emballante, la deuxième partie de la rencontre voit les Tricolores s’envoler petit-à-petit jusqu’à donner à leur victoire une ampleur presque trompeuse (près de trente unités d’écart, meilleur performance en la matière pour Philippe Saint-André, en tant que coach, dans le Tournoi).

Après sa belle victoire en terres écossaises, l’Italie rechute brutalement alors que les Bleus se rassurent (très) légèrement avant le Crunch et se paient même le luxe de rester en course, mathématiquement, pour le couronnement.

Angleterre 25-13 Ecosse : Peu efficaces mais plaisants, les Anglais repassent devant

Un premier acte fou. Un deuxième à peine plus rationnel : le match est enlevé, potentiellement surprenant (l’Ecosse mène de 3 points, 10-13, à la mi-temps) mais le résultat fini par être celui attendu. Pour des Ecossais agréables à voir jouer, le refrain est toujours le même, le plaisir est là, le rythme est enjoué... mais la défaite est l’immanquable issue, à laquelle ils ne peuvent échapper. Ils subissent leur quatrième revers en quatre matchs : la Cuillère de Bois leur tend les bras.

Quant à lui, le XV de la Rose, peu souverain mais particulièrement enthousiasmant (avec l’attaque la plus prolifique du Tournoi), s’empare du leardership grâce à un meilleur pointaverage (+37 contre +32 à l’Irlande et +12 au Pays-de-Galles, les trois Nations culminant toutes à 6 unités au classement). Le dernier opus de la cuvée 2015 s’annonce comme un thriller haletant, chaque  candidat au titre recevant une équipe en quête de rachat... à moins que la France ne vienne coiffer tout  le monde au poteau, dans un rocambolesque scénario.

CINQUIEME JOURNEE : spectaculaire chassé-croisé, l’Irlande de nouveau sacrée

Italie 20 - 61 Pays de Galles : la Botte sombre, le Poireau peut y croire

Dans un premier temps, les Italiens n’ont rien des faire-valoir qu’ils furent la semaine précédente : à la demi-heure de jeu, ils mènent 13-11 face aux Gallois, muselés. Solides devant (dominateurs en mêlée), entreprenants derrière (pour marquer, Venditti vient à ses gros se mêler) ils ravissent leurs supporters. Les  visiteurs prennent les devants à la sirène. Mi-temps, 13-14.

Dans un second ils s’effondrent littéralement, craquant sous les coups de boutoir de Diables Rouges en quête de victoire continentale. La welsh-déferlante emporte tout sur son passage. Le score final en atteste, il existe un vrai gap entre les deux nations : 20-61 lorsque sonne le gong des trois coups de sifflet de l’arbitre. La pression est alors sur Irlandais et Anglais, respectivement distancés de 20 et 16 unités à l’indicateur « points marqués – points encaissé», qui décidera de l’attribution du Trophée. Les Gallois sont en pôle-position pour la gagne.

Ecosse 10 - 40 Irlande : Carton nécessaire pour des Verts... au triomphe alors précaire

Dans le viseur irish, l’objectif est clair : s’imposer d’au moins vingt et un pion chez l’hôte écossais. En dix minutes, le contrat est quasiment à-demi rempli (0-10), puis en vingt-cinq son établissement est presque acquis (3-17) ... mais, fidèles à eux-mêmes, les chouchous de Murrayfield mourront l’arme à la main. Leur déficit de points fond et retombe à la dizaine. Mi-temps : 10-20.

La deuxième période se résume, au tableau d’affichage, à un cavalier seul des Irlandais. Mais, sur le terrain, jusqu’au bout, l’Ecosse se montre dangereuse (74e min, Hogg relâche le ballon au moment d’aplatir). De plus, ce n’est qu’à la 72e minute que les hommes en vert se sont mis à l’abri (10-40) et la pénalité de la dernière action, ratée par Madigan, pourrait bien peser lourd.

C’est donc le Roi de Trèfle, tenant du titre, qui reprend la main... tout en restant sous la menace de son challenger anglais, qui peut encore le bouter de son trône, en marchant sur l’Hexagone.

Angleterre 55 - 35 France : Des deux côtés, un feu d’artifice au goût d’inachevé 

La dernière affiche de ce Tournoi promet donc d’être palpitante. Elle sera... et ce dès sa préface. Coup d’envoi de Plisson, réception de Vunipola et les Anglais « la joue » ! Burrell échappe le ballon au contact : mêlée française. Celle-ci est chahutée et le numéro 10 des Bleus offre une occasion d’essai à la Rose, d’une passe mal assurée. Occasion convertie par Ben Youngs. Moins de deux minutes de jeu et les hostilités sont déjà lancées (7-0, 3e min).

Nouvelle transmission approximative de Plisson (8e), pour l’instant, rien ne sourit aux Tricolores, mais les Anglais ne se montrent pas plus sereins et, en un clin d’œil, la folie va s’emparer de la partie.

Un bon contest de Dusautoir, son capitaine, permet à la France d’ouvrir son compteur (pénalité de Plisson, 7-3, 12e min) avant que Tillous-Borde, d’un essai à zéro passe, ne la projette en tête (7-8, 14e min). Quatre minutes plus tard, nouvelle contre-attaque des Bleus, inspiration de Spedding, conservation de Goujon, renversement rapide, passe sur un pas de Fickou pour Guirado qui décale Nakaitaci : le XV du  Coq emballe le match et, pourtant quasiment insignifiant il y a quelques instants, s’offre le luxe d’une petite marge d’avance (7-15, 19e min, dont0-15 sur les huit dernières minutes). Dès l’action suivante, une avancée de 90 mètres n’aboutit pas mais les Français campent encore aux abords de la Terre Promise. Ce temps fort perpétué ne se concrétise pas (pénalité manquée). Le vent va, à nouveau, tourner. Lawes désosse Plisson (à la limite de l’irrégularité, 25e) puis Ford ramène les siens à cinq unités (10-15, 27e min), tandis que l’ouvreur français continue de se montrer maladroit face aux perches. Sur un ballon gratté par Cole, les Anglais mettent les voiles et d’un essai émaillé de touches artistiques et d’une petite dose de réussite, inscrit par Watson, ils recollent à 15-15 (30e). Ford est plus en réussite que son homologue et, en coin, transforme (17-15, 31e min). Sur un dégagement contré par Fickou, les Bleus passent tout prêt de l’essai (35e) mais le ballon échoue en touche et dans la foulée, c’est bien le XV de la Rose qui enfonce le clou. La remise en jeu est effectuée rapidement et Joseph perce le rideau défensif bleu puis tente de trouver Burrell d’un coup de pied de recentrage (douce ironie... n’est-ce pas Philippe ? (1)). Sauvetage de Bernard Le Roux, mais le ruck suivant entraîne une pénalité. Jouée vite par Brown, elle permet en deux temps à Youngs (échappant à... Le Roux, exténué) de signer un doublé, entre les pagelles qui plus est (24-15, 37e min). D’un ultime effort, les hommes de Stuart Lancaster augmentent encore leur capital, à la 42e minute de ce match débridé. En l’espace d’un quart d’heure, les Tricolores ont ainsi encaissé un cinglant 20-0 et au terme d’une première période spectaculaire, ponctuée de cinq essais et d’incessants turnorvers, l’Angleterre mène 27-15 face à la France.

Le second acte est du même acabit. Les Bleus, d’une action parfaitement maîtrisée, frappent les premiers : Guirado attaque l’intervalle entre les deux centres adverses et envoie Mermoz à l’essai, d’une superbe passe offload (43e, 27-22).La réponse ne tarde pas : valise de Youngs et conclusion de Ford (47e, 34-22), le sacre reste possible pour les Anglais (qui doivent s’imposer de 26 points pour cela). De 30 mètres, Kockott (qui foule la pelouse depuis seulement quelques minutes) se présente face aux perches. Poteau rentrant (52e, 34-25), toute l’Irlande respire... l’Angleterre doit marquer trois fois pour monter sur le toit de l’Europe. Soulagement de courte durée. Spedding se fait croquer, et Nowell mystifie Le Roux et Maestri pour aplatir en moyenne position (54e), Ford ajoute deux points et l’écart grimpe à seize unités (41-25, 55e min).

On approche de l’heure de jeu quand James Haskell tacle Plisson et prend 10 minutes de frigo (57e). A partir d’un « renvoi aux 22 » audacieusement joué, les Français lancent une attaque qui aboutit à un essai de 80 mètres conclu par... Vincent Debaty, premier soutien d’un Noa Nakaitaci décidément insaisissable (41-30, 60e min). En l’honneur du « Belge », la bière doit couler à flot chez les Irish car le titre s’éloigne pour la Perfide Albion. Mais, au diable la raison, les Anglais écoutent leur cœur. C’est devant qu’ils pilonnent la ligne des Bleus, malgré leur infériorité numérique, et le bulldozer Vunipola impose sa surpuissance (48-30, 64e min). Les gros du XV de France, vexés, enfoncent l’en-but adverse d’une cocotte rageuse, à la 66e minute : 48-35, le score prend des proportions démentielles. Très belle réalisation anglaise, en première main, avec l’ « ailier-fermé » (55-35 à la 76e). La Rose n’est plus qu’à un essai transformé du Graal. Elle ne le marquera jamais. La France offre quelques dernières sueurs froides aux supporters du Trèfle lorsque, dans les arrêts de jeu, Yoann Huget joue une pénalité à 5 mètres de sa ligne (2) ... mais la marque n’évoluera plus. Le classement est enfin figé et entériné. L’Irlande est de nouveau couronnée, l’Angleterre et le Pays de Galles complétant le podium, la France devançant l’Italie et l’Ecosse s’octroyant la, si peu désirée, Cuillère de Bois.

Et maintenant ... sur quel pied danser ?

Une confirmation : Au sein même de la compétition, il y a deux divisions

Ce Crunch historique pour le Tournoi _ dont il est le deuxième match le plus prolifique (avec 90 unités cumulées) _ et pour la France, qui n’avait jamais encaissé autant de points face à une Nation de l’hémisphère nord, vient clore une dernière journée qui l’est tout autant : avec 73.7 pts/rencontre, elle rentre dans les annales de l’épreuve.

Mais pour tirer des conclusions de cette orgie rugbystique, il est nécessaire d’en faire l’analyse conjoncturelle : entre les grosses cylindrées, obligées d’engranger le plus de points possibles pour remplir leur objectif de victoire finale, et les plus modestes équipes en quête d’un coup d’éclat, les intérêts étaient parfois convergents autant que les envies de jeu débridé concomitantes.

En tenant ainsi compte du contexte, peu d’enseignements durables sont à noter au sujet de la dernière journée. Mais, outre de cette dernière étape ultra-spectaculaire, ce sprint final explosif a accouché d’un résultat ultra serré _ écart le plus infime entre la première et la troisième place depuis 1973 (égalité entre les cinq participants) _ qui tend à donner du crédit à la thèse d’une césure conséquente qui séparerait les deux parties du tableau final : l’ordre dominant européen est aujourd’hui tricéphale. Ainsi, Français, Italiens et Ecossais (deux, une et zéro victoires) n’ont, hors confrontations directes entre eux, gagné aucun match lors de ce Tournoi.

De plus, la scission supposée s’exerce, statistiquement, depuis plusieurs années. Sur les quatre dernières éditions, les classements moyens respectifs du Pays de Galles, de l’Angleterre et de l’Irlande sont excellents (2e, 2e et « 2,5e ») tandis que ceux de la France, de l’Italie et de l’Ecosse sont bien moins glorieux (« 4,5e », 5e et 5e) et traduisent un vrai gap. Gap, qui s’exportera hors des limites continentales ? Ce type de classifications inter-Coupe du Monde s’avère souvent lourd de sens, à l’heure du rendez-vous planétaire. 

Le classement quadriennal du Tournoi, indicateur rarement trompeur

En effet, la France a rallié la finale de la première édition de la compétition mondiale en 1987 en sortant d’un GC et sans avoir quitté l’une des deux premières places du Tournoi depuis 1983 et le seul triomphe européen à l’échelle du globe (2003) était l’aboutissement d’une période de domination anglaise sur le Vieux Continent (titre en 2000, 2001 et 2003, assorti d’un GC dans le dernier cas). Deux exemples à l’image d’une réalité plus générale.


[Ci-joint, les résultats en’ points cumulés lors des Tournois, par tranches de quatre, depuis 1984 et leur mise en relief avec les parcours des cinq (puis six) pays en Coupe du Monde. En rouge le meilleur de ceux-ci, à chaque édition]

Ainsi, sans qu'un lien de corrélation direct puisse être souligné, une vraie tendance semble se dégager: réussir à bien figurer sur le classement des quatre Tournois qui s'intercalent entre deux Coupes du Monde, est un postulat quasiment nécessaire pour briller lors de la prochaine en date.

Le XV de la Rose (2007-2011), plutôt moribond (mais moins en difficulté que ne le sont nos Bleus depuis 4 ans), est le seul relatif contre-exemple. Mais jamais une Nation classée au de-là du 3e rang, selon le système de hiérarchisation ici choisi, n’a pu se positionner comme étendard continental, en quête de consécration mondiale.

Cette fois-ci, l’ordonnancement général sera-t-il tout aussi rigide, ou un peu plus évolutif ? Se matérialisera-t-il durant la 8e édition de la World Cup ?

1 / Irlande, 8 pts (+63), partition bien léchée

Elle suscitait tant d’espoirs cette « génération dorée » dont Brian O’Driscoll était le symbole... et pourtant, l’Irlande n’a toujours pas réussi à atteindre le dernier carré d’une Coupe du Monde. Sera-ce maintenant qu’elle est privée de celui qui fut son métronome durant une dizaine d’années (O’Gara) et de son inséparable paire de centre (BOD-D’Arcy) qu’elle réussira cette performance inédite ?

Vieux briscard toujours présent, le capitaine Paul O’Connell assure la transition avec brio et le XV du Trèfle n’a rien d’une équipe bancale en quête d’un nouveau souffle. Il est déjà une machine bien rodée. Au-delà de ses individualités (Henshaw est-il promis à un si bel avenir ?) c’est par le caractère imperturbable de son jeu que l’Irlande impressionne.

Suffisamment pour s’avancer en favorite au sacre, à l’automne prochain ? Peut-être pas... _ de l’autre côté du globe, il y a du répondant _ mais pour faire d’elle un sérieux candidat à surveiller ? Incontestablement. Notons que l’hôte de la compétition peut, lui aussi, se montrer confiant.

2 / Angleterre, 8 pts (+57), mutation enclenchée

Sur ses terres, l’Angleterre ne s’appuiera pas sur les mêmes piliers qu’en 2003, lors de son succès planétaire. A cette époque, les pieds magiques de Jonny Wilkinson étaient ses armes à feu et son 8 de devant composé de joueurs d’une expérience et d’une vaillance qui n’avait peu d’égal (Back, Dallaglio etc.) mettait son tireur d’élite dans un fauteuil. Derrière, Jason Robinson pouvait allumer la mèche par ses courses endiablés, mais l’objectif n’était pas de briller. Ce pragmatisme exacerbé est aujourd’hui oublié.

Durant tout ce Tournoi, Watson, Joseph, May, Nowell etc. ont semblé se régaler. De plus, les gros anglais se sont mis à leur diapason, emmenés par un Vunipola excellent et un Haskell renaissant.

Au niveau du potentiel, le XV de la Rose est peut-être l’équipe qui a laissé entrevoir les plus belles perspectives à moyen terme. Ford, son jeune ouvreur, a-t-il déjà les épaules pour l’élever au firmament ? Il semble, en tout cas, avoir le bagage technico-tactique suffisant. Mais l’expérience pourrait lui faire défaut. Autre carte en main qui peut se muer en ombre au tableau : le retour de Manu Tuilagi, pierre angulaire de la ligne de trois quarts anglaise qui aura peut-être du mal à regagner sa place. Cependant, son association avec Joseph peut faire frissonner bien des défenses. Dès le début du mondial, la Rose sera confrontée à celle de son voisin gallois.

3 / Galles, 8 pts (+53), passion et continuité

Ils avaient surpris en 2011, en jouant les demi-finales de la CDM et en échouant à un petit point d’un encore plus long parcours. Aujourd’hui, ils se présentent quasiment à l’identique (Shane Williams, par exemple, a tiré sa révérence)... mais en encore plus forts. Leur meneur, Warburton, leur machine à bonifier les ballons, Faletau, leur infatigable  pilier, Jenkins (110 capes, un record) et leur ligne arrière XXL sont des atouts  toujours d’actualité et qui, pour beaucoup, se bonifient avec le temps. Les Gallois sont de sérieux concurrents. Présents aux côtés de l’Angleterre mais aussi de l’Australie, dans la poule B, ils auront immédiatement un très gros défi à relever.

En plus de leurs qualités intrinsèques, la passion qui parait les porter lorsqu’ils défendent les couleurs de leur patrie a également pu marquer les esprits... notamment aux yeux de certains franciliens.

En effet, si la politique de lutte contre l’exode de ses joueurs les plus performants appliquée, grâce à son système de « dual contracts », par la Welsh Rugby Union devrait bientôt stopper ce phénomène, le Racing Metro a déjà eu le temps d’être confronté à la double personnalité sportive de Mike Phillips, Jamie Roberts et surtout Dan Lydiate

Si les deux premiers y furent décevant, c’est carrément méconnaissable qu’était le troisième (élu meilleur joueur du Tournoi, en 2012) dans l’Hexagone... un Hexagone bien mal en point.

4 / France, 4 pts, identité à façonner et instabilité

En 1954, le XV de France remportait son premier Tournoi. Depuis, il n’avait plus passé cinq années sans réitérer cette performance, ni quatre sans monter sur le podium. C’est maintenant chose faite. 

Trouver le juste milieu entre une défense de fer couplée à une attaque inexistante et une défense « gruyère » qui va de pair avec une attaque spectaculaire paraît une équation insoluble pour les hommes de PSA. Sous le règne de ce dernier, les Bleus semblent embourbés dans une interminable phase de réglage : 82 joueurs appelés depuis le début de la mandature du « Goret », 34 durant cette compétition dont seulement cinq (Dusautoir, Le Roux, Maestri, Huget et Guirado) furent titularisés à chaque match.

Cette instabilité n’est pas anodine, surtout quand on la compare aux nombres de joueurs indiscutables que comptent les adversaires des Tricolores. Là encore, le classement réel se reflète assez fidèlement : l’Angleterre (11 « titulaires absolus »), l’Irlande (10) et le Pays de Galles (9) s’appuyant sur une base immuable plus solide que celle de l’Italie (7), de l’Ecosse (6) et, donc, de la France (5).

Pour la première fois depuis que la Coupe du Monde a été instaurée (en 1987), cette même France s’y avance en tant que Nation européenne mineure. Ce changement de statut est une réalité. Pas une fatalité. En Angleterre, dans quelques mois, elle retrouvera dès la phase de groupe, son plus proche poursuivant, bien plus habitué à regarder de loin les sommets.

5 / Italie, 2 pts, inconstance et manque d’endurance

L’équipe transalpine reste trop limitée pour bouleverser la hiérarchie. Souvent pataude et lente, en difficulté croissante au fur et à mesure de l’avancée de ses matchs (à l’exception de son unique victoire) _ encaissant quinze essais en seconde période... contre seulement quatre en première _ l’Italie est confrontée à l’éternelle sensation de n’être qu’un "petit poucet" capable d’un exploit sans lendemain. 

La force dont fait parfois preuve son paquet d'avants, autant que l'allant manifesté par ses arrières, individuellement, sont bien trop insuffisants encore pour concurrencer les trois gros de devants et espérer sortir pour la première fois des poules au mondial. Sur le cumul des quatre dernières éditions les Italiens terminent tout de même devant des Ecossais (cf tableau précédent) qui, hormis un millésime 2013 plutôt réussi (4pts, 3e), ne cessent de décevoir.

6 / Ecosse, 0 pt, enthousiasme mais déficit de puissance

Deux cuillères de bois en quatre ans pour le Chardon, c'est beaucoup et ce doit être très frustrant... d’autant plus qu’entre le talent de Hogg, le punch de Bennett, la mobilité de ses avants et l’organisation générale prônée par Cotter, l’Ecosse présente quelques bons arguments. Cependant, dans son ensemble, elle souffre d’un criant manque d’impact physique.

Absent de la phase finale d’une World Cup  pour la première fois il y a quatre ans, en Nouvelle-Zélande, le XV écossais trouverait satisfaction dans le fait de rallier à nouveau les quarts de la compétition cette année (jusqu’ici, il s’est incliné à ce stade de la compétition cinq fois sur sept).

Son groupe, au sein duquel l’Afrique du Sud fera figure d’épouvantail, reste « abordable » (Japon, Etats-Unis, Samoa).

Enfin, toutes ces projections ne doivent pas occulter le fait que la farouche bagarre que viennent de se livrer Irlandais, Anglais et Gallois avait un fort enjeu et rien d’une simple escarmouche amicale.

La Coupe du Monde a de plus en plus tendance à phagocyter l’attention : ce qui est rare est précieux, et en cela elle peut se vanter de l’être, en plus de toujours être en mesure de se gargariser de la dimension planétaire que son essence même lui confère. Cependant, le rendez-vous annuel des grandes sélections européennes perdure, jamais escamoté ni réduit au rang de compétition préparatoire. Certes, il crée bien des débats lorsqu'il cause moult tracas aux nouvelles puissances financières que représentent certains clubs professionnels, en les privant de leurs meilleurs joueurs en plein cœur de l'Hiver ... mais son charme ancestral ne saurait être bafoué par leur soif de grandeur pécuniaire. Contre vents et marée, par son atmosphère particulière (3), ses rivalités fratricides et sa saveur unique dont on ne se lasse guère, le Tournoi continue d’exister à part entière.

Simon Farvacque

*(surtout connaissant le contexte dans lequel l’ouvreur Irlandais a été titularisé, à peine remis sur pied suite à une commotion cérébrale.)

(1) www.youtube.com/watch?v=h3PHyrbUNM4

(2) https://www.facebook.com/video.php?v=556161974520702

(3) http://yourzone.beinsports.fr/rugby-6-nations-la-magie-du-tournoi/

Autres sources :

http://www.francetvsport.fr/joseph-sonne-la-revolte-pour-l-angleterre-264863

http://www.francetvsport.fr/le-resume-video-d-ecosse-galles-23-26-266415

http://www.rugbyrama.fr/rugby/6-nations/2015/angleterre-france-55-35-deuxieme-match-le-plus-prolifique-de-l-histoire-du-tournoi-des-6-nations_sto4649473/story.shtml

http://www.rugbyrama.fr/rugby/6-nations/2015/angleterre-france-55-35-antiseche-la-france-a-pris-55-points-mais-elle-nous-a-enfin-fait-vibrer_sto4648994/story.shtml

http://www.lemonde.fr/sport/article/2015/03/23/rugby-a-six-mois-du-mondial-les-six-chantiers-du-xv-de-france_4599282_3242.html

http://yourzone.beinsports.fr/rugby-ercc-1-quelles-nouveautes-qui-pour-remporter-la-premiere-levee-79161/

Publié le 25.03.15





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