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L’essentiel est de gagner les JO...

...le plus dur est d’y participer

Du 5 au 10 janvier 2016, les champions d’Europe (la France), du Monde (la Pologne) et olympique de volley (la Russie), entre autres, s’affrontent à Berlin dans un tournoi de qualification qui n’offrira qu’un seul sésame pour Rio (et deux pour une séance de rattrapage plus aisée). Dès le pied du Mont Olympe, le droit de tenter de le gravir passe donc par des duels au sommet. De quoi revisiter une célèbre phrase, souvent attribuée à tort (et à travers) ou à raison au Baron Pierre de Coubertin : « L’essentiel est de gagner les Jeux Olympiques, le plus dur est d’y participer ».

Certes, le trait est grossi, mais le paradoxe est réel et le processus alambiqué. Aujourd’hui, seuls le Brésil, organisateur, l’Argentine, vainqueur du tournoi de qualification olympique (TQO) sud-américain, les Etats-Unis, qui ont remporté la Coupe du Monde 2015* (à ne pas confondre avec les Championnats du Monde) et l’Italie, dauphine des Américains, sont assurés de participer aux Jeux Olympiques. Douze formations s’y opposeront, et il reste donc huit places à attribuer.

Le TQO européen (à Berlin) en offrira une, tout comme ceux d’Afrique (à Brazzaville, 7-14 janvier) et d’Amérique du Nord/Centrale et des Caraïbes (à Edmonton, 8-10 janvier). Entre le 14 mai et le 5 juin, un tournoi au Japon (auquel participeront notamment les 2 et 3e de l’épreuve berlinoise) récompensera les trois pays qui y figureront le mieux, et la meilleure équipe asiatique (en dehors de ce « top3 »). L’ultime ticket sera décerné durant la même période, à l’issue d’une compétition confrontant des pays d’Amérique et d’Afrique, repêchés car aux portes de la qualification dans leurs TQO respectifs (1). A défaut d’être de croix, le chemin qui mène aux Jeux est tortueux.

Rouzier : « c’est un scandale »

Parmi les équipes-phares du moment qui peuvent se sentir lésées, outre la Slovénie, surprenante vice-championne d’Europe carrément hors course - en vertu de son classement, 25e, au World Ranking (WR) - la France occupe une bonne place, en tant que tenante du titre de la Ligue Mondiale et détentrice de la couronne de reine du Vieux Continent.

Dès l’obtention de celle-ci, la perspective d’une qualification olympique encore non-actée était accueillie avec plus ou moins de philosophie par les Tricolores. Laurent Tillie, sélectionneur pragmatique - « On a fait une superbe campagne (…) mais ça ne reste qu’une étape. (…) C'est ça le haut niveau. C'est oublier, faire abstraction de ce qui s'est passé pour repartir » - se montrant moins vindicatif qu’Antonin Rouzier, MVP remonté : « C'est un scandale qu'on ne soit pas qualifié (…) C'est juste une question de pognon, ça commence à m'énerver. C'est mon petit clin d'œil à la FIVB (Fédération Internationale de Volley-Ball) ». Le pointu des Bleus faisant ainsi référence aux enjeux extra-sportifs que peut représenter la prolifération des compétitions. Enjeux qui expliquent selon lui ce système ô combien complexe : « (les fédérations) qui ont le plus d'argent vont organiser des tournois alors que les champions d'Europe ne sont pas qualifiés. ».

Une amertume, affichée, qui devra se muer en énergie retrouvée, car l’équipe de France n’aborde pas ce rendez-vous déterminant dans une forme olympique… et le programme qui l’attend est copieux.

Tillie : « C’est le plus gros tournoi de volley des vingt dernières années »

Pour le coach des Bleus, le défi est «titanesque. (…) Dix fois plus dur que les Jeux Olympiques ». Un tel obstacle lui paraît même historique, par le niveau des formations appelées à le franchir : « C’est le plus gros tournoi de volley des vingt dernières années. Minimum. ».

Dans le groupe de la Russie (3e au WR), de la Bulgarie (7e) et de la Finlande (18e), la France (10e), comme tous ses concurrents, dira définitivement adieu au Brésil si elle ne termine pas à l’une des deux premières places de sa poule (voir tableau complet ci-dessous). 

En cas de qualification pour les demies, elle pourrait retrouver la Pologne, guidée par Stéphane Antiga et impressionnante lors de son titre planétaire de 2014 (2e), l’Allemagne (9e), la Serbie (12e) ou la Belgique (21e), un adversaire a priori à sa portée… mais qui vient de la battre en match de préparation, mardi, sur le score de 3-0 (avant de la tenir en échec lors d’une « rencontre en quatre sets », mercredi : 2-2).

Ce cuisant revers (25-23, 25-22, 25-18, service et réception en berne) est-il préoccupant ?

Ngapeth : « peut-être un mal pour un bien… mais ça fait mal »

Rouzier le met sur le compte d’un contexte plus joyeux que besogneux : « Nous étions tous heureux de nous retrouver mais on n’était absolument pas prêts à jouer. On a oublié le volley, on a oublié l’essentiel (…) on est arrivés les mains dans les poches (…) et on a pris une claque ». Il se veut plutôt confiant quant à la capacité de réaction de l’auto-proclamée #TeamYavbou : « Je crois que tout le monde a compris. On ne refera pas deux fois la même erreur. ».

Même son de cloche pour Tillie, qui traduisait ce plaisir et cette compétitivité très relative, en parlant « de sourires » mais aussi d’« une fatigue importante », avant le match. Psychologiquement, la remobilisation sera nécessaire, physiquement, la montée en puissance jusqu’au 6 janvier (rencontre face à la Russie) sera chirurgicale : «notre programme doit être bien dosé», ajoute le sélectionneur.  

Rien de dramatique donc, mais un vrai rappel à l’ordre. Earving Ngapeth, à chaud, était très déçu de la prestation offerte au public français (à Tours) - « ça fait mal. On a proposé un sale spectacle » - mais il se projetait déjà sur la remise en question qu’elle devait provoquer « c’est peut-être un mal pour un bien ». Une exigence rassurante, car l’équipe de France ne peut pas se contenter d’afficher un tel niveau de jeu. Sa progression récente ne l’y autorise plus.

Tillie : « on a de la pression, c’est clair »

Non seulement brillants en 2015, mais aussi demi-finalistes des Championnats du Monde 2014, un an après une cinquième place prometteuse aux « Europe », les jeunes Tricolores lorgnent sur l’objectif olympique depuis longtemps : « Ça fait trois ans qu’on bosse pour ça (…) ne pas se qualifier pour les JO, ce serait pratiquement repartir de zéro », dixit Ngapeth.

Les titres qu’ils ont acquis ne leur seront pas retirés… mais les joueurs, comme le staff, savent que si le vécu commun est une force, le statut de puissance montante est un poids dur à assumer. Entre ce standing nouveau et la crainte de galvauder une préparation au long cours, le facteur émotionnel sera prépondérant : « on a de la pression, c’est clair », abonde Tillie.

C’est la notoriété naissante et la force mentale de l’effectif tricolore, (2), qui s’affirme depuis maintenant plusieurs années et a changé de dimension l’an passé, qui va être mis à l’épreuve durant ce tournoi court, intense et primordial - « ça va être une guerre pendant six jours », pour Ngapeth.

L’équipe de France n’est plus un insouciant outsider, elle fait maintenant partie des ténors de son sport, de ceux qui jamais ne peuvent se contenter… de participer.

Simon Farvacque

*à laquelle la France n’était pas conviée (non classée parmi les deux meilleures équipes européennes), en septembre dernier… quelques semaines avant d’être sacrée championne d’Europe devant, entre autre, l’Italie (3e), quant à elle qualifiée pour les Jeux.

(1) http://www.fivb.org/en/volleyball/Rio2016menqualification.asp

(2) Les quatorze sélectionnés : Jonas Aguenier (central), Jénia Grebennikov (libero), Antonin Rouzier (pointu), Benjamin Toniutti (passeur), Kevin Tillie (réceptionneur-attaquant), Earvin Ngapeth (réceptionneur-attaquant), Kevin Le Roux (central), Julien Lyneel (réceptionneur-attaquant), Pierre Pujol (passeur), Nicolas Le Goff (central), Nicolas Marechal (réceptionneur-attaquant), Frack Lafitte (central), Thibault Rossard (réceptionneur-attaquant), Mory Sidibe (pointu)

World Ranking : http://www.fivb.org/en/volleyball/VB_Ranking_M_2015-10.asp

Autres sources :

L'ÉQUIPE 21

http://sports.nouvelobs.com/news-sport/rouzier-c-est-un-scandale-qu-on-ne-soit-pas-qualifies-pour-les-jeux-155838/

http://www.ffvb.org/index.php?mduuseid=Mw%3D%3D&dsgtypid=37&page=actu&actid=MzQ4MA%3D%3D

http://www.francetvsport.fr/volley/championnat-d-europe/le-tqo-chemin-de-croix-des-bleus-vers-rio-304783 - http://www.pa-sport.fr/2015/11/07/volley-ball-tqo-la-france-debutera-par-la-russie/

http://www.eurosport.fr/volleyball/tqo-laurent-tillie-a-ecarte-rossard-et-clevenot_sto5043187/story.shtml - http://www.lequipe.fr/Volley-ball/Actualites/Laurent-tillie-il-y-a-des-sourires-c-est-bien/619997

http://www.lequipe.fr/Volley-ball/Actualites/Antonin-rouzier-on-est-arrive-les-mains-dans-les-poches/620217

Publié le 01.01.2016


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