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Rupeni Caucaunibuca, l’insaisissable funambule

 

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Alors que le retour du basketteur LeBron James, sur les terres de ses premiers exploits, a provoqué un tremblement de terre outre-Atlantique, le rugby français s’apprête à son tour à subir un petit séisme. Non, ce n’est pas un calembour, Rupeni Caucaunibuca pourrait bel et bien porter, à nouveau, les couleurs agenaises cette saison. Que ce come-back se réalise ou non, sa simple évocation est l’occasion de revenir sur la carrière d’un joueur aussi imprévisible sur le terrain qu’en dehors.

 

Samedi 11 Octobre 2003, Suncorp Stadium de Brisbane, pour son entrée en lice dans la Coupe du Monde, l’équipe de France est opposée à son homologue des Fidji. Alors que les Bleus dominent le match sur le score de 24-11, à la 43e minute, le temps s’arrête. Rupeni Caucaunibuca dépose Aurélien Rougerie d’un cadrage-débordement fulgurant, ne se soucie guère du retour d’Imanol Harinordoquy, et se débarrasse de Nicolas Brusque. Une course chaloupée pour un essai limpide : les supporters français qui ne suivent pas le Super 12 découvrent l’immense talent du funambule fidjien*.

Durant ce match, Caucau assène également un violent coup de poing à Olivier Magne, comme un symbole de sa carrière qui oscille continuellement entre les frasques et les exploits. De l’ombre à la lumière, de la terre promise à sa terre natale, Rups est définitivement insaisissable.

Sur le sol français, une fracassante arrivée

Avant d’éclore sur la scène internationale,  Caucaunibuca brillait déjà sous les couleurs des Auckland Blues, aux côtés, entre autres, de Joe Rokocoko, Doug Howlett ou Carlos Spencer, remportant l’édition 2013 du Super 12, scorant au passage huit essais en huit matchs.

Après avoir donc tapé dans l’œil du public français, il ne tarde pas à rejoindre le club d’Agen, devenant rapidement la coqueluche du Stade Armandie. Première saison dans l’élite hexagonale (2004/05) : 16 réalisations en 25 matchs, meilleur marqueur d’essais du championnat. Deuxième saison ? 17 essais en 23 apparitions, il conserve son titre de roi des finisseurs, et décroche même celui de meilleur joueur.

Durant ces deux années, il est le joyau d’une équipe agenaise solidement installée en milieu de tableau : 8e du Top 16 en 2004/05, elle termine même 5e du Top 14 en 2005/06. Mais lorsqu’après cette belle performance, le SU Agen dispute la HCup en 2006/07, il y perd beaucoup d’énergie autant qu’il y gagne le droit de rêver… à un quart de finale européen qu’il ne verra jamais. Au final le club termine 13e du championnat et se voit relégué en Pro D2.

L’échec lot-et-garonnais se résume finalement à la rencontre face à Edimbourg, en octobre. En effet, sa star îlienne disparue des radars pendant tout l’été refait son apparition à l’occasion de ce match, après un séjour prolongé aux Fidji. A la clé, une victoire (19-17), et une récompense d’homme du match pour Caucau. La synthèse des maux d’une équipe qui s’évertue à briller dans une compétition européenne trop grande pour elle et qui dépend trop de son capricieux soliste.

Le club chute donc à l’échelon inférieur, pour la première fois depuis 1926. Dans ce fiasco, sa pépite fidjienne a, elle aussi, perdu de son éclat : en plus de commencer sa saison en retard, Rups la termine en avance, dès le mois de mars, en raison d’une suspension pour consommation de cannabis. Bilan personnel : onze petits matchs de championnats, un seul essai… mais des performances impressionnantes sur la scène continentale, avec notamment un sauvetage spectaculaire sur Brian O’Driscoll himself et une improbable « passe dans la chute » pour un essai de Pépito Elhorga.

Avec le SU Agen, une histoire contrastée

Surtout, le véritable tournant est que, pour la première fois, l’incroyable nonchalance de Caucaunibuca, souvent à la limite de l’outrage envers ses coéquipiers, tant dans ses difficultés à se soumettre aux contraintes du haut niveau que dans sa tendance à ne jamais respecter ses engagements calendaires, impacte véritablement ses performances et les résultats de son club.  Alors que jusqu’ici c’était surtout avec son équipe nationale qu’il défrayait la chronique (suspendu un an pour « refus de sélection »), il cause maintenant du tort à l'organisme vis-à-vis duquel il est contractuellement engagé. D’une part il peut se volatiliser dans la nature pendant plusieurs mois, sans explications préalables, mais il se permet également de faire fi des exigences du sport professionnel, en adoptant une hygiène de vie… très douteuse. Le talent n’excuse pas tout.

Ainsi, lorsqu’à l’été 2007, il ne se présente pas à la reprise de l’entraînement, après trois semaines d’attente, le président agenais Alain Tingaud déclare : « On lui a offert plusieurs possibilités pour se justifier quant à son absence depuis la reprise de l'entraînement, mais sans résultat. […] le club a décidé d'entamer une procédure judiciaire à son encontre et considère à présent qu'il ne fait plus partie de l'effectif professionnel du SUA jusqu'à la fin de la saison ». Décision, apparemment, péremptoire.

Seulement, Rups réapparaît… et est immédiatement réintégré à l’effectif agenais. Comme souvent, ses mensurations « idéales » (1m80 pour 108 kg) ne sont alors qu’une vue de l’esprit. Il accuse une bonne dizaine de kilos en trop et peine à retrouver son niveau.

En décembre 2007, l’ogre toulonnais (qui règne aujourd’hui sur l’Europe) terrorise déjà la Pro D2 lorsqu’il se présente invaincu à Armandie. Peut-il tomber en terre agenaise ? 80 minutes plus tard, la réponse est cinglante : 33 – 0 pour Agen, avec un triplé de son phénomène.

Mais, malgré cette courte (et fantastique) embellie, en février 2008, cette fois c’est fait : Agen, en proie à des problèmes financiers, se sépare de son ingérable star. Clap de fin ? Que nenni ! En novembre de la même année, n’ayant pas trouvé de club durant l’intersaison, le surpuissant ailier fidjien propose à nouveau ses services à son ancien employeur. Ce dernier accepte, et pour son retour à la compétition, le 7 décembre, Caucaunibuca marque l’essai de la victoire face au LOU.

Il termine la saison 2008/09 avec 12 essais en 16 matchs, et s’inscrit de plus en plus dans le projet collectif. Christophe Deylaud le replace d’ailleurs, avec un certain succès, au centre de son attaque. Agen s’incline finalement en demi-finale d’accession au Top14, contre Oyonnax.

L’année suivante, le SUA remporte le championnat de Pro D2 et Caucau le titre de meilleur marqueur d’essais (avec 13 réalisations). Le club agenais réintégrera donc l’élite du rugby français… avec en son sein son diamant brut ?

Au Stade Toulousain, un joker très apprécié

Dès juillet, Rups fait faux bond, pour la énième fois, au club lot-et-garonnais. Son contrat est suspendu, avant d’être définitivement rompu en septembre. Mais à peine un mois plus tard, à la surprise générale, Caucau signe à Toulouse, en tant que joker médical de Yann David.

C’est donc pour sa polyvalence, ¾ centre ou ailier, que Guy Novès compte sur lui. Connaissant l’énergumène, l’entraîneur de la Ville Rose sait qu’il réalise un véritable pari en jetant son dévolu sur le fidjien, « il est revanchard. A nous de le prendre en charge », mais voit en ce dernier une solution miracle à ses éternels problèmes de doublons « (lorsqu’) il faudra se passer de beaucoup de joueurs, je pense qu'on sera bien content de l'avoir ».

Caucaunibuca répondra à ses attentes… allant même au-delà de ses espérances. Excellent dans son rôle de doublure de luxe le fidjien totalise une douzaine de titularisations et marque cinq essais. Le coup de poker est gagnant : Rups est toujours aussi spectaculaire, en témoigne son incroyable essai contre Brive2, et décisif, comme le prouve son doublé contre Clermont, en demi-finale du championnat. De plus, il impressionne cette fois par son sérieux, couvé par son compatriote Vilimoni Delasau, il réalise les efforts nécessaires pour peser sur le jeu de son équipe. Des efforts qui n’échappent pas à Jean-Baptiste Elissalde, responsable des lignes arrières du Stade Toulousain : « Il est parti en vacances pendant dix jours aux Fidji. Il est revenu à l'heure, en ayant perdu vingt kilos. Il nous a montré au fil des matchs qu'il était de plus en plus fiable et qu'il pouvait devenir un atout pour le collectif. Tout le mérite lui revient. »

A la fin de la saison, Toulouse, après avoir été absent des deux dernières finales de Top 14, récupère son titre de champion de France, trois ans après son dernier sacre. L’aventure avec Caucaunibuca peut-elle continuer ? Premier match de la saison 2011/2012, ce dernier se blesse gravement au genou. Terrible coup du sort : il ne rejouera plus de l’année. Le Stade décide de s’en séparer.

Pour toujours, maître dans l’art du contre-pied

Depuis il se fait discret. L’an dernier, il ne joue que trois match d’ITM Cup (championnat des provinces néozélandaises), et n’anime plus vraiment le marché des transferts, malgré quelques rumeurs tenaces… jusqu’à la semaine dernière. En effet depuis peu, c’est l’effervescence chez les supporters agenais : le retour de leur star est programmé ! Mais sur le compte twitter du club lot-et-garonnais, c’est encore au conditionnel que cette nouvelle est annoncée : « Sous réserve de remplir les conditions médicales et physiques, le phénomène Rupeni Caucaunibuca devrait rejoindre le SUA ».

Personne ne sait quelle surprise le génial fidjien est encore capable de nous réserver.

Comme tous les grands sportifs, Caucau déchaîne les superlatifs : on peut s’extasier devant son impressionnante vitesse, mettre en avant ses changements d’appui phénoménaux, l’accuser de défier les lois de la physique, en présentant un indécent alliage de puissance et d'agilité…. On peut même stigmatiser son attitude parfois indolente sur le terrain ou sa constance dans le manque de respect vis-à-vis de ses propres engagements.

Mais un mot plus que tout autre le caractérise à merveille. Rupeni Caucaunibuca est unique.

Farvacque Simon

 

*http://www.youtube.com/watch?v=_qW1RlXOLfQ

2 http://www.youtube.com/watch?v=Ps7f8NB5CEw


Autres sources :

http://www.itsrugby.fr/joueur_773.html

http://www.ladepeche.fr/article/2004/11/08/250550-caucaunibuca-idolatre-par-agen.html

http://www.liberation.fr/sports/2010/07/27/le-fidjien-caucaunibuca-ex-star-du-rugby-demeure-introuvable_668511

http://www.ladepeche.fr/article/2007/08/07/9300-pro-d2-agen-ne-veut-plus-jouer-avec-caucaunibuca.html

http://www.rugby365.fr/infos-clubs/toulouse/toulouse-caucau-le-pari-de-noves-73405.shtml

http://www.rugby365.fr/infos-clubs/toulouse/caucau-pari-gagnant-8817.shtml

15/07/2014


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