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Nick Abendanon ...

... délicieux arrière, goût d'inachevé

Sentir le rugby. Cette expression, qui se décline de manière plus familière dans le jargon de l’ovalie, colle à la peau de Nick Abendanon. Ni le plus rapide (bien que doté d’une belle pointe de vitesse), ni le plus costaud (point de débat), l’arrière anglais, cette saison, éclabousse pourtant le Top 14 et l’European Rugby Champions Cup (ERCC1) de toute sa classe. Cette réussite actuelle tranche avec une carrière encore inaboutie au regard de son potentiel. Portrait de ce diamant brut et plein de délicatesse, poli au fil du temps et enfin prêt à scintiller autant que l’augurait son talent.
 
Le jeune Nick Abendanon, 20 ans, né en Afrique du Sud, honore sa première sélection pour le XV de la Rose en ce 11 août 2007. En ligne de mire, le mondial français, que l’Angleterre disputera en tant que tenante du titre et auquel il espère participer.
 

Un peu trop tendre pour la WC 2007

Titulaire à Twickenham, il doit faire ses preuves face aux Bleus, dans ce match de préparation opposant deux prétendants au titre suprême. Peu en évidence durant la partie, Abendanon achève de décevoir lorsqu’à l’aube des dix dernières minutes, il ne fait pas le poids face à l’autobus-Chabal, lancé à vive allure. Courageusement, autant qu’inutilement, il a pourtant tenté de s’opposer au Caveman… mais ce dernier l’a effacé pour terminer sa chevauchée en terre promise. Le Coq, jusqu’ici mené 14-15, remporte le match 21-15, en terre conquise.

En raison (ou non) de cette relative contre-performance, Abendanon n’est pas retenu dans l’escouade chargée de défendre le trophée William Webb Ellis (Brian Ashton lui préférant Mark Cueto et l’indéboulonnable Jason Robinson). Rappelé pour préparer la finale face aux Springboks, suite à la blessure de Josh Lewsey, il ne figure pas dans les 22 sélectionnés pour disputer ce dernier acte, remporté par l’Afrique du Sud (15-6). N’est-ce que partie remise ? Que nenni. Depuis son initial accroc, il n’a plus jamais reporté le numéro 15 de sa patrie.

Aujourd’hui, il est de retour sur le devant de la scène internationale (du moins continentale) en brillant sous les couleurs de Clermont. De haut... en haut, en passant par des bas, comment en est-il arrivé là ?

De grand espoir à « simple » très bon joueur

Loin du feu des projecteurs des rencontres entre nations, il n’a cessé de réaliser de belles saisons. Au sein du club de Bath, auquel il est resté fidèle durant neuf ans, il s’est imposé comme un incontournable élément.

Collectivement, il y a connu des fortunes diverses, s’y forgeant un très modeste palmarès, notamment au deuxième échelon européen. En effet, en 2008, il marque un essai en finale de la feu-Amlin Challenge Cup et Bath remporte la compétition (24-16 contre Worcester). Quelques mois avant son bail éclair en équipe d’Angleterre, en 2007, il était déjà passé tout près de glaner ce titre, son club perdant l’ultime rencontre face à... Clermont (22-16).

Au sein de son championnat domestique, Bath est alors une puissance ré-émergente : 9e en 2005-2006, 8e en 2006-2007, puis présente dans le Top 5 de la saison régulière durant quatre saisons, sans parvenir à peser sur les phases finales. De son côté, Abendanon ne devient pas le joueur exceptionnel que son début de carrière laissait penser mais il atteste d’une belle régularité. Pendant huit ans, il marquera ainsi plusieurs essais chaque année (entre trois et dix) tout en catalysant le jeu de son équipe... sans réussir à lui faire passer un cap.

En fin de cycle à Bath...

Après une nouvelle période terne (8e en 2011-12, 7e en 2012-13), paradoxalement entamée lors du rachat du club par Bruce Craig, mécène millionnaire (2010), l’équipe de Bath compte depuis l’an passé sur sa nouvelle génération pour remonter la pente (5e en 2013-14). Cette génération-ci, Jonathan Joseph (23 ans) et Anthony Watson (21 ans) en sont les étendards et le second cité fait alors de l’ombre à Abendanon,  encore en pleine possession de ces moyens mais déjà affublé du rôle de « vieux briscard ».

Ainsi, le fidèle Nick voit son influence diminuer considérablement, en même temps que son temps de jeu : 11 titularisations en Aviva Premiership contre 17 (en moyenne) et jamais moins de 14 par an depuis 2006-07.

Son départ pour l’Auvergne est acté en cours d’année (dès février), mais il est tout de même titulaire en finale de la dernière « Challenge Cup », qui voit Northampton s’imposer (30-16).

Tandis que son ancien amour réalise un excellent opus 2014-15 (défait en quart de finale de l’ERCC1 et encore en course pour le titre national) Abendanon s’épanouit donc pleinement loin d’Albion, dans ce top 14 qu’il n’intégrait pourtant pas en tant que « star ».

... Une deuxième jeunesse à Clermont

En effet, il a débarqué à l’ASM en même temps que Zac Guildford et Jonathan Davies (deux joueurs plus médiatisés que lui... même si le premier nommé l’est souvent pour des raisons extra-sportives), et donc dans un relatif anonymat.

De plus, à son arrivée, avec Jean-Marcellin Buttin (2 sélections en équipe de France) voire, justement, Guildford (ailier susceptible de jouer à l’arrière, 10 apparitions avec les All Blacks), l’effectif clermontois n’est pas dépourvu de prétendants au fauteuil de numéro 15. 

Rapidement, Abendanon s’approprie ce siège si disputé. Son apport est réel dans un style qui tranche avec celui de son prédécesseur, Lee Byrne, très sûr sous les chandelles et dans le placement mais dont les courses rectilignes n’apportaient qu’une faible plus-value offensive.

 Il régale les Jaunards de ses interventions (ici face aux Saracens, voir 10e sec), faites dans un excellent timing, et de ses inspirations (récupération et essai en contrepassage de bras décisif pour Wesley Fofana etc. durant le quart de finale d’ERCC1 brillamment gagné par Clermont face à Northampton, 37-5).

A l’image de ces actions, n’ayant rien d’ « incroyable » mais parfaitement réalisées, son jeu semble être un savant mélange de simplicité et de spontanéité.

L’esprit d’initiative, sans fioritures

Ainsi, au contraire de Joe Rokocoko  ou Quade Cooper , qui mettent leurs appuis dévastateurs au service de leur créativité au point d’inventer des mouvements d’esquive, tels des artistes ne pouvant dépourvoir leurs actes de toute notion d’esthétisme ... l’arrière anglais reste plus discret, consacrant ses qualités à la recherche de l’efficacité. 

Point de gestes superflus, peu d’appétence envers les pas de danse mais une grande facilité à perforer les défenses, pistant le moindre petit intervalle au sein des rideaux les plus denses. C’est donc avec une certaine sobriété que Nick Abendanon, tel un bon vin, se bonifie au fil des années. Jusqu’où cette progression le mènera-t-elle ?

Sa discrétion _ que l’on pouvait apparenter à une stagnation _ tout comme celle de son club de Bath, l’ont donc longtemps tenu éloigné de son équipe nationale… qu’en est-il maintenant que son aisance refait surface, au plus grand bonheur d’une grosse cylindrée du Vieux Continent (à l’échelle duquel il se montre particulièrement à son avantage, faisant partie des cinq prétendants au titre de meilleur joueur de l’ERCC1 version 2014-15) ?

Pour plusieurs raisons, la donne semble inchangée.

Très hypothétique retour en sélection

En effet, si aujourd’hui, le débat de son retour sous la tunique frappée de la Rose émerge, plus ou moins sérieusement, en raison de ses excellentes prestations… le règlement de la RFU (fédération anglaise) ne lui laisse que peu d’espoirs, définissant comme impossible pour les joueurs basés outre-manche le fait de représenter l’Angleterre « sauf en cas de circonstances exceptionnelles. »

De plus, au sein de la hiérarchie des n°15 anglais, sans même tenir compte de Delon Armitage (dans une situation similaire à la sienne), il ne figure qu’en cinquième position : Brown, le titulaire, Goode, la doublure de ce dernier, Watson, son talentueux ex-coéquipier, polyvalent arrière-ailier, et Ben Foden, le blessé qui espère postuler, le devançant depuis plusieurs mois voire années.

Le principal intéressé ne se cache pas de garder à l’esprit la grande messe mondiale qui se tiendra en Angleterre dans quelques mois (18 septembre – 31 octobre) «  (Le fait d’y participer, ce) serait comme un rêve qui deviendrait réalité », tout en restant prudent … « Mais je n'y pense pas encore. », se doutant certainement, que ce combat n’est plus le sien. Le train passe rarement deux fois, il faut parfois accepter d’emprunter un autre chemin.

Savoureux pied de nez à son rêve brisé ?

Le 2 mai prochain, l’ASM affrontera le RCT, sur la pelouse de Twickenham, pour le gain de la première édition de l’European Rugby Champions Cup. A cette occasion, Nick Abendanon (28 ans) atteindra le point culminant de sa carrière... à l’endroit même où il n’avait su la faire décoller, huit ans auparavant,  lorsqu’il n’avait ni l’expérience ni la maturité pour exploiter son potentiel.

Il défiera ainsi son passé, à défaut de le réécrire, cherchant à prouver que son présent n’a rien à lui envier et qu’il présage encore d’un bel avenir.

Simon Farvacque

Sources :

http://www.lerugbynistere.fr/news/xv-rose-debat-autour-selections-steffon-armitage-nick-abendanon-relance-0604151202.php

http://www.itsrugby.fr/joueur-2965.html

http://www.bbc.com/sport/0/rugby-union/32193071

Publié le 28/04/2015

 

 

 

 

 

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